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Qu’il ne regarde en vous autre chose que vous ;
Et cent fois, si je puis le dire sans offense,
Ses vœux se sont armés contre votre naissance,
Leur chaleur indiscrète a d’un destin plus bas
Souhaité le partage à vos divins appas,
Afin que de ce cœur le noble sacrifice
Pût du Ciel envers vous réparer l’injustice ;
Et votre sort tenir des mains de mon amour,
Tout ce qu’il doit au sang dont vous tenez le jour.
Mais puisque enfin les Cieux, de tout ce juste hommage,
À mes feux prévenus dérobent l’avantage.
Trouvez bon que ces feux prennent un peu d’espoir
Sur la mort que mon bras s’apprête à faire voir ;
Et qu’ils osent briguer par d’illustres services,
D’un frère et d’un État les suffrages propices.

Done Elvire
Je sais que vous pouvez, Prince, en vengeant nos droits
Faire par votre amour parler cent beaux exploits.
Mais ce n’est pas assez pour le prix qu’il espère
Que l’aveu d’un État, et la faveur d’un frère.
Done Elvire n’est pas au bout de cet effort,
Et je vous vois à vaincre un obstacle plus fort.

Dom Garcie
Oui, Madame, j’entends ce que vous voulez dire,
Je sais bien que pour vous mon cœur en vain soupire ;
Et l’obstacle puissant qui s’oppose à mes feux,
Sans que vous le nommiez, n’est pas secret pour eux.

Done Elvire
Souvent on entend mal ce qu’on croit bien entendre,
Et par trop de chaleur, Prince, on se peut méprendre.
Mais puisqu’il faut parler, désirez-vous savoir,
Quand vous pourrez me plaire, et prendre quelque espoir ?

Dom Garcie
Ce me sera, Madame, une faveur extrême.

Done Elvire
Quand vous saurez m’aimer, comme il faut que l’on aime.

Dom Garcie
Et que peut-on, hélas ! observer sous les cieux