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LE GUEUX DE MER

En effet Baudouin Ewoutsen n’avait pas besoin de secours. Son artillerie, avantageusement placée, submergea ou dissipa les canots, tandis que les navires zélandais, attaquant le centre de la flotte, y portaient une confusion et une frayeur d’autant plus vive que l’on s’était cru à l’abri de tous les dangers. Un nuage de feu et de fumée couvrit alors la mer depuis l’endroit où le Lion d’or avait échoué, jusqu’à celui où s’était arrêtée l’arrière-garde, et don Juan de la Cerda vit un petit nombre de braves prendre ou brûler sous ses yeux la plupart de ses transports sans qu’il pût s’y opposer.

Dans cette position, si cruelle pour un homme de cœur, il prit la seule résolution qui pût au moins lui faire espérer une juste vengeance. Rassemblant autour de son pavillon vingt et un navires de guerre qui le suivaient encore, il entreprit de doubler le banc de sable qui le séparait des ennemis et de les enfermer à leur tour dans le passage étroit où ils se trouvaient. D’un autre côté, don Julian Roméro, commandant de l’arrière-garde, formait avec ses douze caravelles une ligne impénétrable entre la côte et le banc. Ainsi les vainqueurs à leur tour se trouvaient en péril.

La plupart des transports s’étaient rendus ou avaient échoué. La fumée s’était dissipée, et les onze navires vainqueurs laissaient apercevoir leur petit nombre et leur faiblesse. Les plus braves Zélandais pâlirent alors en comparant leurs bâtiments, construits pour le cabotage, avec les citadelles flot-