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navire était rempli. Profitant de leur surprise, ils se jetaient sur eux comme sur une proie assurée ; mais, quoiqu’attaqués à l’improviste et dans un moment de désordre, les Espagnols ne se laissèrent pas massacrer sans résistance. Ils se réunissaient par pelotons dans les endroits du navire où il leur était possible de faire usage de leurs armes, et se défendaient avec le courage du désespoir. Incapables de former leurs rangs ou même de se tenir de pied ferme sur un bâtiment échoué, aucun cependant ne cherchait à fuir ou à obtenir grâce. Ils se précipitaient sur les matelots pour les entraîner dans leur chute ; mais ceux-ci, plus accoutumés à un pareil champ de bataille, avaient un avantage immense sur leurs adversaires, et, après quelques moments de combat, tous les malheureux soldats furent égorgés, ou jetés dans les flots.

Quoique cette lutte inégale se passât en vue des vaisseaux de guerre, les Espagnols n’osaient approcher de peur des bas-fonds, ni faire usage de leur artillerie, dans la crainte d’atteindre leurs compatriotes ; mais ils mirent en mer leurs embarcations, et vingt chaloupes pleines de gens armés entourèrent le navire de Baudouin Ewoutsen.

À ce spectacle tout l’équipage du petit flibot d’Ewout Pietersen Worst poussa de grands cris, et demanda le signal d’attaque. Au vent ! au vent ! disaient les marins : au secours du Lion d’or ! Mais l’amiral défendit de déployer les voiles, car le moment n’était pas encore venu.