Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/43

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
41
LE GUEUX DE MER

L’étonnement se peignit sur la figure de la douairière. Pour l’officier, qui découvrait enfin combien il s’était grossièrement trompé, il grinçait des dents, et la fureur contractait tous les muscles de son visage. Arrêtez ! s’écria-t-il d’une voix étouffée ; c’est à moi de vous quitter, puisque j’ai eu le malheur d’offenser Votre Seigneurie. Adieu donc, mesdames, adieu ! Souvenez-vous de don Christophe de Sandoval.

Il sortit le sourire sur les lèvres et la rage dans le cœur. La baronne n’avait point essayé de le retenir ; elle restait interdite de l’audace que sa nièce avait montrée, et ce ne fut qu’après quelques minutes quelle trouva la force de s’expliquer.

— Marguerite, mon enfant, dit-elle d’une voix faible et en s’arrêtant presque à chaque syllabe, comment osez-vous traiter ainsi un défenseur de la bonne cause ?… un soldat du roi ?… J’avoue que don Sandoval ne montre pas assez d’estime pour nos Flamands… et la fierté que vous avez montrée était loin de me déplaire… car vous êtes d’une maison… le sang des Waldeghem… (Ici la bonne dame toussa deux ou trois fois pour reprendre le fil de ses idées.) Mais, ma nièce, cet accident va me faire regarder comme une femme tolérante en matière d’opinions. Il y a tant de personnes jalouses de ma réputation politique et religieuse ! Comme elles vont profiter de l’occasion pour me faire déchoir du premier rang ! Et que dira votre père, si le bruit de cette aventure parvient jusqu’à Madrid, où il jouit de