Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/380

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mâts ébranlés, ils connaissent le péril et ne se plaignent pas ; mais leur silence et leur dévouement, mieux que tous les discours rappellent au jeune capitaine son devoir.

Mettant la main devant les yeux pour ne point voir le navire qui emporte sa bien-aimée, il donne d’une voix étouffée l’ordre d’amener les voiles. Le sifflet aigu du contremaître se fait entendre, et dans une minute toutes les vergues sont couvertes de matelots.

À peine l’ordre est-il exécuté qu’un coup de vent furieux vient soulever le navire, et si les voiles eussent encore été déployées, c’en était fait du flibot ; la perte de tous ses mâts eût été le moindre malheur qu’il eût pu éprouver.

Quelque douleur que lui causât la nécessité cruelle d’abandonner Marguerite à ses ravisseurs, Louis de Winchestre retrouva toute son énergie à la vue du danger. Il donna rapidement les ordres convenables, et ses braves marins le secondèrent si bien que dans quelques minutes on eut enlevé tout ce qui donnait prise à la tempête.

Elle éclata bientôt ; elle fut longue et terrible, mais le flibot était bien construit et monté par d’habiles matelots : il n’éprouva d’autre inconvénient que d’être chassé de sa route et poussé vers l’est.

Au même moment le plus affreux des coups de canon se fit entendre. C’était un signal de détresse. Le jeune capitaine frémit, mais il n’y avait aucun moyen possible d’aller au secours du navire en