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verneur de la citadelle d’Anvers, entreprit plusieurs expéditions hardies, mais presque toujours vaines, contre les gueux de mer qui infestaient l’embouchure de l’Escaut. Ces marins audacieux venaient jusque sous le canon des forteresses espagnoles enlever les navires ennemis et la ville retentissait sans cesse du bruit de leurs exploits.

Ces nouvelles faisaient une impression singulière sur le comte de Waldeghem. Vieilli sous les drapeaux de Charles-Quint et de Philippe, la persécution qu’il avait éprouvée n’avait point altéré ses opinions et son dévouement au Roi ; cependant il ne pouvait se défendre d’un sentiment d’orgueil national en apprenant les triomphes de ses compatriotes. Il s’en réjouissait presque malgré lui, et s’il s’écriait quelquefois : Pauvre monarque ! malheureux don Philippe ! cent fois par jour il lui échappait de répéter : Braves Zélandais ! vaillants gueux de mer ! sage et généreux Guillaume !

Marguerite ne lui cachait point sa prédilection pour les patriotes, et le vieillard n’en était pas offensé, car Louis de Winchestre l’avait entièrement réconcilié avec eux. Il l’appelait en riant une petite rebelle, une audacieuse révoltée ; mais il avouait qu’elle était la fille la plus soumise, la plus tendre, la plus dévouée à son père.

Plusieurs mois s’écoulèrent. Octobre revint enfin : c’était à cette époque que devait finir le deuil de Louis de Winchestre ; Marguerite le savait et les jours lui paraissaient plus longs que des siècles.