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LE GUEUX DE MER

brodées, elle prit en main le Miroir de la parfaite dévotion, excellent ouvrage qu’elle avait fait garnir d’une couverture de velours cramoisi et de fermoirs dorés. Quoiqu’elle le sût à peu près par cœur, elle n’en lut pas moins quelques chapitres avec une attention parfaite et un profond recueillement. Marguerite, assise à côté d’elle sur un humble tabouret, s’efforçait de l’écouter et s’étonnait de ne pouvoir surmonter sa distraction.

Malgré la forme un peu antique des vêtements qu’elle avait pris pour la matinée, la douairière n’en était pas moins habillée avec assez de soin. C’était une loi qu’elle s’était imposée, afin de ne jamais paraître aux yeux de ses domestiques sans l’appareil convenable à son rang. Sa nièce portait le même costume que dans la soirée de la veille, car elle savait que la vieille dame ne lui eût point permis de se présenter devant elle en négligé ; seulement, elle n’avait point mis de perles dans sa coiffure, et ses beaux cheveux, simplement tressés, n’étaient retenus que par un ruban étroit.

Avant l’heure où l’usage permettait les visites du matin, c’est-à-dire immédiatement après la première messe, le bruit d’un sabre qui traînait sur les carreaux de marbre du vestibule signala l’approche d’un militaire, et un laquais annonça don Christophe de Sandoval.

Marguerite tressaillit. Elle avait déjà rencontré quelquefois à Bruges cet orgueilleux Espagnol, et quoiqu’il se fût efforcé de lui plaire, elle avait été