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LE GUEUX DE MER

Seul au milieu de plusieurs officiers qui déjà mettaient l’épée à la main, l’intrépide jeune homme semblait se croire invulnérable ; il ne faisait aucun mouvement pour se retirer ni pour se défendre, il ne prononçait pas une seule parole. Mais son regard semblait dire : ils n’oseraient.

Don Sandoval paraissait plongé dans une morne stupeur : trois fois il porta la main à son poignard, et trois fois la honte d’assassiner un homme sans défense l’arrêta. — Malheureux, dit-il enfin, qui es-tu ?

— Je suis Belge, répondit le jeune marin sans changer de contenance, et ce mot suffit pour justifier ma conduite ; mais, si vous voulez en apprendre davantage, je suis prêt à me faire connaître partout ailleurs qu’ici.

L’Espagnol pâlit et fit un pas en arrière. C’est un rebelle, murmura-t-il ; arrêtons-le, il a pris le parti des hérétiques.

— Oh ! non ! non ! s’écria Marguerite en étendant vers les officiers ses mains suppliantes.

— De grâce, seigneurs espagnols, dit le bourgmestre éperdu, point de violences dans ma maison !

— C’est un rebelle, répéta don Sandoval en dégainant son sabre.

— C’est au moins un patriote, reprit le jeune homme avec un regard assuré ; c’est un Flamand qui connaît ses droits et qui saura les défendre : attaquez-moi donc, si vous voulez.

En parlant ainsi il avait tiré de sa ceinture deux pistolets, dont la vue intimida les plus hardis. Profi-