Page:Moinaux - Les deux aveugles.pdf/4

Cette page a été validée par deux contributeurs.
4
LES DEUX AVEUGLES
PATACHON, à part, chantant.

J’ai la vole, la vole, la vole.

GIRAFFIER, même jeu.

Il me vole, me vole, me vole.

PATACHON.

Ça me fait trois.

GIRAFFIER.

Marquez.

PATACHON.

À vous à donner, cher Giraffier.

GIRAFFIER.

Je donne, vertueux Patachon. (A part.) Je vais te rendre la pareille.

PATACHON, à part.

Que vois-je ? il tripote ! Serait-ce aussi un filou ?

GIRAFFIER, faisant sauter la coupe très-visiblement. À part.

Ça n’est pas plus difficile que ça. (Il tourne.) Le roi !

PATACHON.

Plus de doutes, il est aussi voleur que moi. (Jouant.) Trèfle !

GIRAFFIER.

Je prends ; atout de la dame, du valet, de l’as et du dix ; ça me fait quatre.

PATACHON.

Comment quatre ? Trois !

GIRAFFIER.

Quatre !

PATACHON, avec colère.

La vole et le roi, trois !

GIRAFFIER.

Le roi, le point et la vole, quatre !

PATACHON, se levant avec colère.

Quatre, filou ! tu crois que je n’ai pas vu ton petit manège ? Tu n’es qu’un malheureux ! un escroc !

GIRAFFIER.

Toi-même n’es qu’un grec ; mais je te reconnais ! tu es l’homme aux béquilles du pont Saint-Michel !

PATACHON.

Je te reconnais aussi, tu es le manchot du même pont !

GIRAFFIER.

Mon rival !

PATACHON.

Mon concurrent ! (Tous deux saisissent leurs pliants)

GIRAFFIER.

Ah ! canaille !

PATACHON.

Ah ! malotru ! (Ils s’enfoncent mutuellement leurs pliants sur la tête et se bousculent.)

GIRAFFIER.

Ah ! faux béquillard !

PATACHON.

Tiens, faux Bélisaire !

TOUS DEUX.

Quelqu’un vient ! (Ils se dégagent vivement. Patachon prend par méprise la guitare, Giraffier le trombone, tous deux reprennent à tue-tête leur refrain pendant qu’un passant traverse le pont.)

––––––––––La lune brille,
––––––––––La nuit scintille, etc.


La partition des Deux Aveugles, pour piano et chant, se trouve chez les éditeurs G. BRANDUS et S. DUFOUR, 103, rue de Richelieu. Prix net : 2 fr.- La musique seule. Prix net : 75 c.
FIN