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recevoir… Mais je veux que tu assistes à l’entrevue. (Sur un geste de Robert, durement.) Je le veux !… C’est bien le moins, je pense ?

Robert

Pourquoi, mon père ?…

Hargand

Parce que je le veux !…


Robert fait un geste résigné. Hargand arpente la pièce avec agitation. Ensuite, il vient s’asseoir à son bureau, où il brutalise des papiers. Long silence. Entrent les délégués.



Scène V

HARGAND, ROBERT, JEAN ROULE, LOUIS THIEUX, TROIS AUTRES DÉLÉGUÉS
Ils entrent lentement, la casquette à la main, Jean Roule, le premier, sombre, mais très calme, suivi de Louis Thieux, courbé, un peu blanchi, embarrassé et gauche. Ils se rangent devant le bureau d’Hargand, intimidés par la richesse sévère de la pièce. Louis Thieux a les yeux fixés sur le tapis, les autres tournent leurs casquettes dans leurs mains, à l’exception de Jean Roule, qui, très droit, le poing sur la hanche, reste libre et hautain, sans provocation. Hargand n’a pas bougé. Le corps, légèrement incliné en arrière, le coude appuyé au bras du fauteuil, et le menton dans sa main, on voit qu’il se compose un visage, sans expression, d’une immobilité glacée. Robert, qui, au moment de l’entrée des délégués, a échangé un regard rapide avec Jean Roule, s’efface maintenant, dans un coin de la pièce. Silence gênant.


Hargand, d’une voix brève.

Eh bien… Je vous écoute !