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fait de ne pas sortir aujourd’hui… Tu aurais mieux fait !

Le patron s’était levé à son tour, frémissant de colère. Kerhuon reprit :

— Jean Donnard, te souviens-tu de Jacques Pengadec qui était sorti aussi lui, et qui n’est jamais revenu ?

— Veux-tu faire ce que j’ai dit, vilain cancre ?

— Non, Jean Donnard. Ni moi, ni personne ici, tu entends !

Et Kerhuon se croisa les bras et regarda Donnard, menaçant.

Jean Donnard s’était subitement radouci — non qu’il tremblât, mais il voulait savoir quelle pensée de révolte s’allumait dans ce cerveau de brute.

— Voyons, Pierre Kerhuon, dit-il presque amicalement, es-tu donc devenu fou ? Pourquoi refuses-tu de m’obéir ?

— Pourquoi ? demanda le misérable en laissant traîner ses mots lentement. Pourquoi ? Tu le sais bien, Jean Donnard. C’est