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un bouton, et toutes les fleurs s’illuminent… C’est féerique, mon cher monsieur… et vous ne savez pas à quel point cela me dégoûte… Cela me dégoûte tellement que, dans mes palais, yachts, châteaux et villas, j’ai remplacé la lumière électrique par la lumière fumeuse et primordiale des oribus… Ah ! nom d’un chien, mon cher monsieur, ne devenez jamais riche…

Dickson-Barnell poussa un long soupir. Il se tourna et se retourna sur les coussins sans pouvoir trouver une position qui lui fût agréable. Et il poursuivit d’un ton lamentable :

— J’ai essayé de la science, de la philosophie, de la photographie et de la politique. J’ai lu, lu, lu des livres de toute sorte et de tout le monde. J’ai voulu soumettre, pour en extraire des idées et me les approprier, les œuvres de M. Paul Bourget, de M. René Doumic, de M. Melchior de Vogüé, au même procédé mécanique de concassement et de lavage que les blocs aurifères, dont on extrait l’or.

— Hélas ! interrompis-je… Il y a bien longtemps que ces livres ont passé par des cribles plus sévères que les vôtres. Et il n’en est resté, jusqu’ici, que de la matière inerte et du poids mort.

— Quand je vous le disais !… gémit l’infortuné Dickson-Barnell… Tout est infumable… Et tenez !… J’ai été en affaires avec le roi des Belges