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« — Oh ! non… Mais je voudrais que tu prennes un bain, tout de suite.

« — Voyons, c’est de la folie !… Ce soir, oui… Mais maintenant ?

« — Oh ! je voudrais tant… tant… tant…

« Elle joignait ses petites mains ; sa voix était suppliante.

« — Ma chérie, c’est insensé ce que tu me demandes là… Et puis, je t’assure que c’est dangereux…

« — Oh ! fais-moi ce plaisir… Je voudrais, mon chéri…

« Elle vint s’asseoir sur ses genoux, l’embrassa tendrement, murmura :

« — T’en prie… tout de suite !

« Ils passèrent dans la salle de bains. Laure voulut préparer la baignoire elle-même et disposa sur une table des savons, des pâtes, des brosses, des gants de crin, des pierres ponces

« — Et c’est moi qui te frictionnerai… Tu verras comme c’est bon.

« Lui, tout en se déshabillant, protestait encore, répétait :

« — Quelle drôle d’idée !… Et puis, c’est très dangereux, comme ça, si vite… après le dîner… Tu sais, des gens en sont morts…

« Mais elle riait d’un joli rire clair et sonore.

« — Oh ! des gens… D’abord, quand on fait plaisir à sa petite femme, on ne meurt jamais.

« Il s’acharnait.