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çait de préférence son esprit de démolition…

— Un paresseux, et voilà tout !… Il veut donner à son inexcusable paresse des excuses transcendantes et philosophiques, dont vous ne devriez pas être la dupe… C’est vraiment trop de naïveté !… Et puis, croyez-vous qu’il soit flatteur pour une femme délicate de recevoir chez elle, d’avoir à sa table un tel goret !… Sa saleté me répugne, me soulève le cœur, me rend malade… S’il avait de l’amitié pour vous, il aurait du respect pour moi… il décrasserait ses guenilles, se laverait les mains, et ne se tiendrait pas devant moi, comme devant une fille de brasserie… Il viendrait, de temps en temps… tous les trois ou quatre mois… déjeuner avec nous… Soit !… Mais, s’installer ici, lui et sa hotte d’ordures, pendant des semaines… je vous assure que cela m’est pénible !…

Un jour que Pierre était parti seul dans la campagne, Jeanne me dit :

— Il faut en finir, mon cher Paul. Je ne veux pas que ma maison se désorganise à cause de votre ami… Voilà encore une femme de chambre qui me quitte, parce qu’elle ne veut pas — et je comprends sa répugnance — faire le ménage de M. Lucet… C’est un vrai fumier, sa chambre. Et son linge… on ne le prendrait pas même avec un crochet !… De quoi avons-nous l’air,