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Société, Richesses

de l’homme commence à se distinguer & à s’étendre jusques à l’intellect. L’animal est avide du présent & du présent momentané, l’homme est avide du présent & sans bornes : il l’est du passé, dans lequel il se cherche des titres de possession, des ayeux, des annales ; il l’est encore du futur, qu’il ambitionne au-delà de son existence. Il est avide de tout, & tandis que la nature d’une part le force à se réunir à son semblable, l’intellect lui fait d’autre part sentir qu’il s’appuie sur son rival, sur l’ennemi naturel de toutes ses prétentions.

Ce n’est pas ici le lieu de considérer cet intellect comme un présent de la Divinité, destiné primitivement à des fonctions toutes nobles & dignes de son origine. La trace de cette institution premiére se montre à la réflexion plus encore qu’à la foi. L’homme le plus barbare, démêlé par des yeux perçans, laisse voir au spectateur le germe de vertus qui ne