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tante. Les troupeaux du roi doivent mourir du tac et de la contagion ; les tumeurs et les ulcères doivent boursoufler toute sa chair et toute celle de son peuple ; le tonnerre mêlé de grêle, la grêle mêlée de feu, doivent déchirer le ciel d’Égypte et tourbillonner sur la terre, dévorant tout, là où ils roulent. Ce qu’ils ne dévoreront pas en herbe, fruit ou graine, doit être mangé d’un nuage épais de sauterelles descendues en fourmilière et ne laissant rien de vert sur la terre. L’obscurité doit faire disparaître toutes les limites (palpable obscurité), et effacer trois jours ; enfin, d’un coup de minuit tous les premiers-nés d’Égypte doivent être frappés de mort.

« Ainsi dompté par dix plaies, le dragon du fleuve se soumet enfin à laisser aller les étrangers, et souvent humilie son cœur obstiné, mais comme la glace toujours plus durcie après le dégel. Dans sa rage poursuivant ceux qu’il avait naguère congédiés, la mer l’engloutit avec son armée, et laisse passer les étrangers comme sur un terrain sec entre deux murs de cristal. Les vagues, tenues en respect par la verge de Moïse, demeurent ainsi divisées jusqu’à ce que le peuple délivré ait gagné leur rivage. Tel est le prodigieux pouvoir que Dieu prêtera à son prophète, quoique toujours présent de son ange qui marchera devant ses peuples dans une nuée, et dans une colonne de feu ; le jour une nuée, la nuit une colonne de feu, afin de les guider dans leur voyage et d’écarter derrière eux le roi obstiné qui les poursuit. Le roi les poursuivra toute la nuit, mais les ténèbres s’interposent et les défendent de son approche jusqu’à la veille du matin. Alors Dieu, regardant entre la colonne de feu et la nue, troublera les ennemis et brisera les roues de leurs chariots ; quand Moïse, par ordre, étend encore une fois sa verge puissante sur la mer ; la mer obéit à sa verge : les vagues retombent sur les bataillons de l’Égypte, et ensevelissent leur guerre.

« La race choisie et délivrée s’avance du rivage vers Chanaan à travers l’inhabité désert ; elle ne prend pas le chemin le plus court, de peur qu’en entrant chez les Chananéens alarmés,