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Et je suis revenu, afin de communiquer ma connaissance. Mais malheur à qui part et ne revient pas.

Et ne me plains pas d’y être allé et d’avoir vu. Ne pleure pas sur moi :

Noyé dans la béatitude de l’ascension, ébloui par l’œuf solaire, précipité dans la démence de l’éternité noire d’à côté, les membres liés par l’algue des ténèbres, moi je suis toujours dans le même lieu, étant dans le lieu même, le seul situé.

Apprends de moi que toute maladie est une confession par le corps.

Le vrai mal est un mal caché ; mais quand le corps s’est confessé, il suffit de bien peu pour amener à soumission l’esprit même, le préparateur des poisons secrets.

Comme toutes les maladies du corps, la lèpre présage donc la fin d’une captivité de l’esprit.

L’esprit et le corps luttent quarante ans ; c’est là le fameux âge critique dont parle leur pauvre science, la femme stérile.

Le mal a-t-il ouvert une porte dans ton visage ? le messager de paix, Melchisedech entrera par cette porte et elle se refermera sur lui et sur son beau manteau de larmes. Mais répète après moi : Pater noster.

Vois-tu, le Père des Anciens, de ceux qui parlaient le langage pur, a joué avec moi comme un père avec son enfant. Nous, nous seuls, qui sommes ses petits enfants nous connaissons ce jeu sacré, cette danse sainte, ce flottement heureux entre la pire obscurité et la meilleure lumière.

Il faut se prosterner plein de doutes, et prier. Je me plaignais de ne le point connaître ; une pierre où il était