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LIVRE VIII

L’ATTAQUE A MAIN ARMÉE (ZAÏAZD).


L’astronomie du Woïski. — Remarque du Président sur les comètes. — Scène mystérieuse dans la chambre du Juge. — Thadée, pour avoir voulu jouer au plus fin, tombe dans de plus grands embarras. — Une nouvelle Didon. — L’attaque à main armée. — La dernière protestation de l’huissier. — Le Comte prend possession de Soplitzow. — Assaut — Massacre. — Gervais transformé en sommelier. — Le banquet des envahisseurs.


Il est un moment triste et calme avant l’orage,
Où, suspendant son vol menaçant, le nuage
S’arrête, et, retenant ses souffles furieux,
Muet, semble marquer des éclairs de ses yeux
Les endroits où sa foudre ira frapper dans l’ombre ;
Tel est de Soplitzow le calme morne et sombre :
Tous se taisent, en proie à leurs pressentiments ;
Tous attendent, rêveurs, de grands événements.

On se lève de table ; on va, devant l’entrée,
Respirer en causant l’air pur de la soirée.
On s’assied près du seuil sur des bancs de gazon,
Et tous, sombres, muets, contemplent l’horizon.
Le Ciel paraît moins vaste, et semble avec mystère
Descendre, et, par degrés, s’approcher de la Terre.
Puis tous deux, se couvrant d’un voile ténébreux,
Ainsi que deux amants, ils chuchotent entre eux.
De soupirs étouffés on entend des mélanges,
Et ces bourdonnements, ces murmures étranges,
D’où sort confusément la musique du soir.

La chouette a d’abord gémi sur le toit noir ;
Puis des chauves-souris les ailes frémissantes
Ont heurté du logis les vitres reluisantes ;
Plus bas, en bruissant, les phalènes, leurs sœurs,
Des robes vont frôler les confuses blancheurs ;
Mais de Zosia surtout leur vol baise la joue :
Aux flammes de ses yeux leur fol essaim se joue.
Les insectes en chœurs se groupent dans les airs ;