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se sont formées de la même manière. Il y a un grand intérêt à les étudier, même pour expliquer l’histoire littéraire des Grecs. Mais il ne faut pas se faire l’illusion de croire que ces poëmes peuvent égaler la vaste et merveilleuse composition grecque, ou qu’on pourra en former un ensemble de cette grandeur.

Après la chute de l’indépendance serbienne, et vers la fin du cycle héroïque, commence un autre cycle qu’on pourrait appeler romanesque. Les événements nationaux ne forment plus le sujet principal des poëmes ; les idées nationales se rattachent à un individu quelconque, qui reste ainsi représentant de son époque. On a choisi, parmi les individus du cycle romanesque, un fils du roi, un certain Marco, et on lui a attribué tous les hauts faits des guerriers serbiens. Il est le héros de tous les combats, le représentant de toute la nationalité serbienne. Il ressemble, sous ce rapport, au roi Arthur de Bretagne, qui forme aussi le cycle de la poésie chevaleresque, et qui, selon les croyances populaires, vit et agit toujours. De même Marco, fils du roi Woucaschine, selon la poésie populaire, jouissait d’une espèce d’immortalité. Vivant des siècles, il fit la guerre en Europe, dans les pays serbiens, et dans le pays des Latins, c’est-à-dire dans l’Occident ; on croit même qu’il n’est pas mort, qu’il vit en ermite retiré dans les montagnes, désespéré de la découverte de la poudre et des armes à feu qui mirent fin à l’héroïsme ancien.

Le poëme qui raconte les hauts faits du prince Marco forme le cycle romanesque, après lequel vient le cycle de poésie civile et domestique.