Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/245

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ordre de remettre l’étendard à quelqu’un de vous et de rester auprès de moi.

» Mais Bozko lui répond :

» — Va, ô ma sœur, retourne à la tour blanche ; mais moi, je ne retournerai pas et je ne donnerai à personne cet étendard de la croix quand le roi me ferait cadeau de sa ville de Krouschevatz, car mes compagnons pourraient dire, si je restais avec toi : — « Voyez ce lâche Bozko, il n’ose pas aller à Kossowo, » verser son sang pour son prince et mourir en défendant sa foi ! — »

Après Bozko, vient Yug et ses autres enfants. La reine arrête successivement tous ses frères, et chacun d’eux refuse de rester. Arrive enfin le plus jeune d’entre eux qui ne peut pas encore combattre : il conduit les chevaux de bataille des princes. Celui-ci refuse également de rester, et il franchit, en se hâtant, la porte de la forteresse.

« À cette vue, la reine chancelle et tombe sans connaissance sur une pierre froide. Dans ce moment le roi Lazare passe, et, voyant son épouse Militza étendue sur une pierre froide, il s’arrête et appelle son serviteur Goluban et lui dit :

» — Goluban, fidèle serviteur, descends de ton cheval ; ôte les sangles, prends ta maîtresse par ses blanches mains et ramène-la vers la tour. Ne va pas à Kossowo, reste dans ma maison blanche. —

Mais ce serviteur lui-même, après avoir ramené la reine, monte à cheval et retourne au champ de bataille ; de sorte qu’il ne reste pas un seul domestique mâle dans le palais.