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LES SOLDATS DE LA RÉVOLUTION

son insu les jeunes voix sorties de son sein parmi les combats et qui, envolées à peine, étaient oubliées de lui.

« Ne quittons pas le glaive tant qu’il y a de la terre esclave dans notre grande Italie ! tant que l’Italie n’est pas une, des Alpes à la mer !

« Tant qu’il restera un cœur, un bras, elle ira flottante, altière, pour la rédemption des peuples, la bannière aux trois couleurs, qui, née sur les échafauds, descend terrible aux armées, parmi les vaillants qui jurent :

« Non, ne quittons pas le glaive, etc. »

Je renonce à traduire. Il faut qu’on sache une chose, c’est qu’on ne traduit jamais. Chaque langue a sa puissance, qui ne passe nullement aux autres. Une langue ne prête pas son âme, pas plus qu’un homme son cœur. Comment surtout pourrais-je rendre cette éclatante harmonie italienne, splendide comme le soleil ? Comment ferais-je entendre ce rythme éclatant, ce souffle pressé, cette forte intonation, déterminée, héroïque, dans la basse (Non deporrem la spada), et, par moments, perçante, comme un éclat de trompette, clangor ! comme dit le latin ; puis la voix redescend, qui ressaisit avec calme la finale grave et virile qui revient de strophe en strophe, comme un guerrier acharné : Non deporrem la spada ?