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LES SOLDATS DE LA RÉVOLUTION

si précoce, accorde un mot à l’amour, un mot grave et touchant. Il rappelle le silence héroïque de Mme Bandiera, qui n’arrêta pas son époux et qui mourut de sa mort : « Reines des cœurs, apprenez comme on aime !… Jetez sur sa tombe une fleur. »

Mameli, comme les Bandiera, était fils d’un officier de marine. La famille de sa mère comptait deux doges de Gênes, et des plus amis de la liberté. Il était né très, faible, d’un tempérament lymphatique et nerveux. Souvent malade dans son enfance, il avait donné à ses parents de grandes inquiétudes et n’avait été conservé que par les soins infinis de sa mèrei Longtemps on défendit de le faire étudier. Mis fort tard aux écoles, il fit ses études en trois ans ; le grec, les mathématiques, la philosophie, il prit tout à la course, et réussit dans tout. Son écueil fut le droit. Il ne put voir sans un profond dégoût la Babel des lois italiennes des lois en foule, et point de droit !

Le Piémont avait compilé un code de vieilleries gothiques. Naples, hypocritement, gardait le code français pour le violer dans tous les sens. La torture et la bastonnade florissaient en Sicile. À Rome, toutes les lois du Moyen-âge ; je me trompe, une seule, la fantaisie des prêtres. Le confessionnal était l’auxiliaire du bureau de police ; le curé dénonciateur, sur l’aveu du matin, vous faisait arrêter le soir.

Il faudrait un gros livre pour dire la moindre partie des maux qu’endurait l’Italie. Je tais sa misère financière, la succion terrible qu’exerçaient sur elle les vampires implacables qu’on appelait gouvernement, clergé. La seule Lombardie, en peu d’années,