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LES SOLDATS DE LA RÉVOLUTION

la retraite ? — Oui, mon ami, dit-il, la retraite de l’ennemi. »

Pichegru destitué, les représentants voulaient nommer Desaix général en chef. Il refusa obstinément. « Jamais vous ne ferez, dit-il, cette injure aux vieux militaires ; je suis le plus jeune des officiers. » Il fallut qu’on nommât Moreau.

Quand on chercha un homme pour défendre Manheim, et pour y périr, le Comité de salut public nomma Desaix. Quand Moreau, par deux fois, fit le grand et périlleux passage du Rhin, il l’exécuta par Desaix. Quand on chercha enfin, l’ennemi venant à nous, quel serait le général qu’on jetterait dans Kehl pour s’y faire écraser et arrêter là l’Allemagne, c’est encore Desaix qu’on choisit.

Ce fort de Kehl était un fort en terre, une pauvre bicoque sans palissade, avec quelques pièces de campagne. Desaix, peu auparavant, l’avait pris en deux heures. Il le garda deux mois.

Les Autrichiens, systématiques et savants militaires, bâtirent autour du fort des ouvrages énormes, une ligne de puissantes redoutes dont chacune eût valu le fort. Tout cela supérieurement armé de canons qu’on amène de Manheim et Mayence. On les amène pour Desaix. N’ayant pas de canons, il sort et prend ceux de l’ennemi. Il en prend dix, en encloue vingt, rentre avec sept cents prisonniers. De temps à autre, il faisait, la nuit, le jour, de victorieuses sorties. L’ennemi avait perdu douze mille hommes quand il parvint enfin à dominer le Rhin par ses batteries. Desaix alors traita mais à une condition, c’est qu’il emporterait « tout ce qu’il juge-