Page:Michelet - OC, Les Femmes de la Révolution, Les Soldats de la Révolution.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.
27
LES FEMMES DU 6 OCTOBRE (89)

les chargea d’amener les boulangers de Sèvres, avec tout ce qu’ils auraient. Il y avait huit pains en tout, trente-deux livres pour huit mille personnes… On les partagea, et l’on se traîna plus loin. La fatigue décida la plupart des femmes à jeter leurs armes. Maillard leur fit sentir d’ailleurs que, voulant faire visite au roi, à l’Assemblée, les toucher, les attendrir, il ne fallait pas arriver dans cet équipage guerrier. Les canons furent mis à la queue, et cachés en quelque sorte. Le sage huissier voulait un amener sans scandale, pour dire comme le palais. À l’entrée de Versailles, pour bien constater l’intention pacifique, il donna le signal aux femmes de chanter l’air d’Henri IV.

Les gens de Versailles étaient ravis, criaient « Vivent nos Parisiennes ! » Les spectateurs étrangers ne voyaient rien que d’innocent dans cette foule qui venait demander secours au roi. Un homme peu favorable à la Révolution, le Genevois Dumont, qui dînait au palais des Petites-Écuries, et regardait d’une fenêtre, dit lui-même : « Tout ce peuple ne demandait que du pain. »

L’Assemblée avait été, ce jour-là, fort orageuse. Le roi, ne voulant sanctionner ni la Déclaration des droits, ni les arrêtés du 4 août, répondait qu’on ne pouvait juger des lois constitutives que dans leur ensemble, qu’il y accédait néanmoins, en considération des circonstances alarmantes, et à la condition expresse que le pouvoir exécutif reprendrait toute sa force.

« Si vous acceptez la lettre du roi, dit Robespierre, il n’y a plus de constitution, aucun droit d’en avoir