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LES DAMES SAINT-AMARANTHE

crédulité furieuse serrait sur ses yeux le bandeau.

Il était à craindre pourtant que l’équité et le bon sens ne retrouvassent un peu de jour, que quelques-uns ne s’avisassent de cette chose si simple : Il y a deux Robespierre.

En juin eut lieu à grand bruit, avec un appareil incroyable, le supplice solennel des prétendus assassins de Robespierre, parmi lesquels on avait placé les Saint-Amaranthe.

Le drame de l’exécution, monté avec un soin, un effet extraordinaires, offrit cinquante-quatre personnes, portant toutes le vêtement que la seule Charlotte Corday avait porté jusque-là, la sinistre chemise rouge des paricides et de ceux qui assassinaient les pères du peuple, les représentants. Le cortège mit trois heures pour aller de la Conciergerie à la place de la Révolution, et l’exécution employa une heure.

De sorte que, dans cette longue exhibition de quatre heures entières, le peuple put regarder, compter, connaître, examiner les assassins de Robespierre, savoir toute leur histoire.

Des canons suivaient les charrettes, et tout un monde de troupes. Pompeux et redoutable appareil qu’on n’avait jamais vu depuis l’exécution de Louis XVI. « Quoi tout cela, disait-on, pour venger un homme ! Et que ferait-on de plus si Robespierre était roi ? »

Il y avait cinq ou six femmes jolies, et trois toutes jeunes. C’était là surtout ce que le peuple regardait et ce qu’il ne digérait pas ; — et, autour de ces femmes charmantes, leurs familles tout entières, la Saint-Amaranthe, avec tous les siens, la Renault avec tous