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CHARLOTTE CORDAY

comme prêtre immoral. Il est inutile de dire que Mlle Corday n’était en rapport avec aucun prêtre, et ne se confessait jamais.

À la suppression des couvents, trouvant son père remarié, elle s’était réfugiée à Caen chez une vieille tante, Mme de Breteville. Et c’est là qu’elle prit sa résolution.

La prit-elle sans hésitation ? non ; elle fut retenue un moment par la pensée de sa tante, de cette bonne vieille dame qui la recueillait, et qu’en récompense elle allait cruellement compromettre… Sa tante, un jour, surprit dans ses yeux une larme : « Je pleure, dit-elle, sur la France, sur mes parents et sur vous. Tant que Marat vit, qui est sûr de vivre ? »

Elle distribua ses livres, sauf un volume de Plutarque qu’elle emporta avec elle. Elle rencontra dans la cour l’enfant d’un ouvrier qui logeait dans la maison ; elle lui donna son carton de dessin, l’embrassa, et laissa tomber une larme encore sur sa joue… Deux larmes ! assez pour la nature.

Charlotte Corday ne crut devoir quitter la vie sans d’abord aller saluer son père encore une fois. Elle le vit à Argentan, et reçut sa bénédiction. De là elle alla à Paris dans une voiture publique, en compagnie de quelques Montagnards, grands admirateurs de Marat,

    savait enfoncer le couteau, c’est que nul amour humain n’avait amolli son cœur. — Le plus absurde de tous, c’est Wimpfen, qui la fait d’abord royaliste ! amoureuse du royaliste Belzunce ! La haine de Wimpfen pour les Girondins, qui repoussèrent ses propositions d’appeler l’Anglais, semble lui faire perdre l’esprit. Il va jusqu’à supposer que le pauvre homme Potion, à moitié mort, qui n’avait plus qu’une idée, ses enfants, voulait… (devinez !…) brûler Caen, pour imputer ensuite ce crime à la Montagne ! Tout le reste est de cette force.