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Shakespeare a dit : « La Pitié sous figure d’un petit enfant ».

Les femmes diront qu’il a bien dit. Au mot d’enfant, tout leur cœur s’ouvre et s’attendrit.

Mais, nous autres hommes, qui savons davantage les réalités, nous dirons que les enfants, si légers, si insouciants, favorisés de la nature en cent choses, puissants de leur jeune croissance et de l’âge ascendant, sentent le mal infiniment moins et ne sont pas le symbole souverain de la pitié.

Voulez-vous savoir la personne malheureuse, vraiment malheureuse, et l’image vraie de la Pitié ? C’est la femme qui, dans l’hiver, à certaine époque du mois, souffreteuse et toute craintive de tels accidents prosaïques qui souvent viennent en même temps, est forcée d’aller rire au bal, dans une foule légère et cruelle…

Hélas où est donc sa mère ? ou plutôt un homme aimant qui la soigne, travaille pour elle, lui permette de rester le soir chaudement close et devant le feu ? il la ferait, ces jours-là, coucher de bonne heure, et lui, continuant sa veille, il aurait pour récompense ce dernier mot à voix basse : « Mon Dieu, je vous donne mon cœur, à vous et à mon mari ! »