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à sa pudeur et peut-être à sa vie même. On la tint à la pénitence la plus cruelle pour elle, celle de ne pouvoir se confesser ni communier. Elle retombait malade dès qu’elle ne communiait pas. Son furieux ennemi, Sabatier le Jésuite, vint dans cette loge, et, chose bizarre, nouvelle, il entreprit de la gagner, de la tenter par l’hostie ! On marchanda. Donnant donnant : pour communier, il fallait qu’elle s’avouât calomniatrice, indigne de la communion. Elle l’aurait peut-être fait par excès d’humilité. Mais, en se perdant, elle aurait aussi perdu et le carme et ses frères.

Réduit aux arts pharisaïques, on interprétait ses paroles. Ce qu’elle disait au sens mystique, on feignait de le comprendre dans la réalité matérielle.

Elle montrait, pour se démêler de tous ces pièges, ce qu’on eût le moins attendu, une grande présence d’esprit (voir surtout p. 391).

Le plus perfide, combiné pour lui ôter l’intérêt du public, mettre contre elle les rieurs, ce fut de lui faire un amant. On prétendit qu’elle avait proposé à un jeune drôle de partir avec elle, de courir le monde.

Les grands seigneurs d’alors qui aimaient à se faire servir par des enfants, des petits pages, prenaient volontiers les plus gentils des fils de leurs paysans. Ainsi avait fait l’évêque du petit garçon d’un de ses fermiers. Il le débarbouilla. Puis, quand ce favori grandit, pour qu’il eût meilleure apparence, il le tonsura, lui donna figure d’abbé, titre d’aumônier, à vingt ans. ce fut M. l’abbé Camerle. Élevé