Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/531

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui venait de Louvain, qui avait déjà exorcisé, était ferré en ces sottises.

Ce que le Flamand d’ailleurs avait à faire de mieux, c’était de ne rien faire. On lui donnait en Louise un auxiliaire terrible, trois fois plus zélé que l’Inquisition, d’une inextinguible fureur, d’une brûlante éloquence, bizarre, baroque parfois, mais à faire frémir, une vraie torche infernale.

La chose fut réduite à un duel entre les deux diables, entre Louise et Madeleine, par-devant le peuple.

Des simples qui venaient là au pèlerinage de la Sainte-Baume, un bon orfèvre par exemple et un drapier, gens de Troyes en Champagne, étaient ravis de voir le démon de Louise battre si cruellement les démons et fustiger les magiciens. Ils en pleuraient de joie, et s’en allaient en remerciant Dieu.

Spectacle bien terrible cependant (même dans la lourde rédaction des procès-verbaux du Flamand) de voir ce combat inégal ; cette fille, plus âgée et si forte, robuste Provençale, vraie race des cailloux de la Crau, chaque jour lapider, assommer, écraser cette victime, jeune et presque enfant, déjà suppliciée par son mal, perdue d’amour et de honte, dans les crises de l’épilepsie…

Le volume du Flamand, avec l’addition de Michaëlis, en tout quatre cents pages, est un court extrait des invectives, injures et menaces que cette fille vomit cinq mois, et de ses sermons aussi, car elle prêchait sur toutes choses, sur les sacrements, sur la venue prochaine de l’Antéchrist, sur la fragilité des femmes, etc., etc. De là, au nom de ses Diables, elle revenait