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bien des siècles, le serf mena la vie du loup et du renard, qu’il fut un animal nocturne, je veux dire agissant le jour le moins possible, ne vivant vraiment que de nuit.

Encore jusqu’à l’an 1000, tant que le peuple fait ses saints et ses légendes, la vie du jour n’est pas sans intérêt pour lui. Ses nocturnes sabbats ne sont qu’un reste léger de paganisme. Il honore, craint la Lune qui influe sur les biens de la terre. Les vieilles lui sont dévotes et brûlent de petites chandelles pour Dianom (Diane-Lune-Hécate). Toujours le lupercale poursuit les femmes et les enfants, sous un masque, il est vrai, le noir visage du revenant Hallequin (Arlequin). On fête exactement le pervigilium Veneris (au 1er  mai). On tue à la Saint-Jean le bouc de Priape-Bacchus Sabasius, pour célébrer les Sabasies. Nulle dérision dans tout cela. C’est un innocent carnaval du serf.

Mais, vers l’an 1000, l’église lui est presque fermée par la différence des langues. En 1100, les offices lui deviennent inintelligibles. Des Mystères que l’on joue aux portes des églises, ce qu’il retient le mieux, c’est le côté comique, le bœuf et l’âne, etc. Il en fait des noëls, mais de plus en plus dérisoires (vraie littérature sabbatique).


Croira-t-on que les grandes et terribles révoltes du douzième siècle furent sans influence sur ces mystères et cette vie nocturne du loup, de l’advolé, de ce gibier sauvage, comme l’appellent les cruels barons. Ces révoltes purent fort bien commencer souvent