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curieux, qui croit tout, toutes les choses merveilleuses. Il écrit celle-ci, la brode de sa plate rhétorique, gâte un peu. Mais la voici consignée et consacrée, qui se lit au réfectoire, bientôt à l’église. Copiée, chargée, surchargée d’ornements souvent grotesques, elle ira de siècle en siècle, jusqu’à ce que, honorablement, elle prenne rang à la fin dans la Légende dorée.


Lorsqu’on lit encore aujourd’hui ces belles histoires, quand on entend les simples, naïves et graves mélodies où ces populations rurales ont mis tout leur jeune cœur, on ne peut y méconnaître un grand souffle, et l’on s’attendrit en songeant quel fut leur sort.

Ils avaient pris à la lettre le conseil touchant de l’Église : « Soyez des enfants nouveau-nés. » Mais ils en firent l’application à laquelle on songeait le moins dans la pensée primitive. Autant le christianisme avait craint, haï la Nature, autant ceux-ci l’aimèrent, la crurent innocente, la sanctifièrent, même en la mêlant à la légende.

Les animaux que la Bible si durement nomme les velus, dont le moine se défie, craignant d’y trouver des démons, ils entrent dans ces belles histoires de la manière la plus touchante (exemple, la biche qui réchauffe, console Geneviève de Brabant).

Même hors de la vie légendaire, dans l’existence commune, les humbles amis du foyer, les aides courageux du travail, remontent dans l’estime