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fait en plein jour, on eût vu qu’il vivait encore ? Sa situation matérielle n’était pas désespérée.

Son frère en jugea ainsi. Il montra une remarquable présence d’esprit. Le tumulte était extrême. Lebas se brûlait la cervelle ; Coffinhal, hors de lui-même, accusant Henriot de tout, le jetait par la fenêtre. Robespierre jeune ôta ses souliers, passa hors de la croisée, regarda froidement la place, marcha une ou deux minutes, tenant ses souliers à la main, sur le cordon de pierre qui règne autour du monument. L’aspect désolé de la Grève, les canons qui se tournaient contre la Commune, lui firent croire que c’en était fait. Alors il se précipita, se brisa presque sur les marches, sans pourtant pouvoir se tuer.

Le meurtrier, si jeune et peu endurci, n’était pas trop rassuré sur ce qu’il venait de faire. Il s’adressa aux gardes nationaux des Gravilliers, comme pour leur expliquer qu’il n’était pas un assassin : « Je n’aime pas le sang, dit-il ; j’aurais voulu verser celui des Autrichiens ; je ne le regrette point, puisque j’ai versé celui des traîtres. »

Dans leurs récits officiels, Fréron et Barras voudraient faire croire qu’ils étaient là, et que ce fut leur approche qui décida tout. Tout a fui devant ces foudres de guerre.

Ils n’arrivèrent qu’à l’aube, entre trois et quatre heures, au moment où l’on regardait si Robespierre et Couthon existaient encore. Fréron vit Couthon gisant au parapet du quai, entouré d’hommes féroces