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Elle se leva bientôt, dans cette joie enfantine, sans rien faire pour son salut, sans se douter que la tyrannie restait tout entière, et elle s’ajourna au soir.

Il était trois ou quatre heures. Robespierre avait été conduit aux Comités, comme pour être interrogé… On a vu combien Barère l’avait encore ménagé. Sauf Billaud, Collot, Élie Lacoste, nul membre des Comités n’avait parlé contre lui. Qu’avait-il à craindre ? De passer, comme Marat, au tribunal révolutionnaire ? Là son immense ascendant moral, l’intérêt, le zèle d’une armée de fonctionnaires créés et placés par lui, les foudroyantes adresses des sociétés populaires arrivant de toute la France, lui ménageaient un triomphe tout autre que celui de Marat, bien près de l’apothéose. Sa personnalité multiple, qui remplissait toute chose, le rendait nécessaire et fatal, quoi qu’il arrivât. Il était devenu comme l’air dont la République vivait. Dans l’étouffement d’asphyxie qu’entraînerait son absence, la France allait venir à genoux dans cette prison lui demander de sortir. A lui d’exiger des juges, d’imposer à ses ennemis la nécessité du procès.

Cependant le bruit étonnant de l’arrestation de Robespierre se répandant dans Paris, le mot fut celui-ci : « Alors l’échafaud est brisé ! »

Tellement il avait réussi, dans tout cet affreux messidor, à identifier son nom avec celui de la Terreur.

Ce jour même, un incident pathétique avait bouleversé les cœurs.