Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/386

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

temps de les surveiller, de se mettre en garde contre leurs complots. »

Barère se reconnut à merveille, sentit qu’on venait à lui. Les trois fournées de suspects étaient un pas préalable pour passer aux représentants. Il était très effrayé, mais ne perdait pas la tête. Rentrant chez lui avec Vilatte, un jeune juré bavard, il lui fit, comme par élans, par soupirs d’effusion, la liste effroyable des représentants que Robespierre allait frapper : « Encore s’il n’en voulait que tant... S’il ne voulait que ceux-ci ! S’il ne voulait que ceux-là », etc. Confidences que Vilatte ne manqua de répandre et qui étendirent la terreur dans toute la Convention.

Les jacobins chancelant fort, Robespierre ne perdit point de temps pour tirer d’eux ce qu’il voulait : la radiation d’abord de Dubois-Crancé, de Fouché et le vote d’une adresse où la société, se déclarant contre l’indulgence, endosserait la responsabilité de tout le sang qu’on versait.

Le lendemain de la troisième fournée du Luxembourg (qui eut lieu le 10 juillet, 22 messidor), il mit donc les fers au feu, répéta la dixième fois la calomnie tant répétée : Que Dubois-Crancé avait sauvé les Lyonnais. Les jacobins le rayèrent[1].

  1. Il est curieux de voir comment MM. Bouchez et Roux profitent des moindres équivoques pour faire dire à Robespierre le contraire de ce qu’il veut dire. Lisez la table de leur tome XXXIII, vous le trouverez, p. 341 : Robespierre déclare qu’il veut arrêter l’effusion du sang. Allez à cette page (copiée du Moniteur, qui lui-même copie le Journal de la Montagne, imprimé aux Jacobins) ; vous y lisez que, selon Robespierre, la justice natio-