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mots de la situation. Si la séance trop longue envahissait l’heure des repas, l’assistance avait le plaisir de voir Anaxagoras tirer un petit morceau de pain de sa poche et le manger sobrement, à sa grande édification. Le Parisien d’autrefois disait aux nouveaux débarqués : « Vous avez vu au Pont-Neuf la Samaritaine battre les heures au carillon ? » et le Parisien de 1793 disait de même : « Avez-vous vu Anaxagoras Chaumette ? »

Nous entrons dans un temps sombre avec 1794, tellement que je me surprends à croire qu’il y eut du soleil encore dans la nuit de 1793. Le volcan, au moins, y fît la lumière. On mourait, mais on vivait. Une page de Desmoulins ou Clootz, une boutade de Marat, faisaient tressaillir. Les carrefours avaient encore leurs orateurs, leurs assemblées ; Varlet criait sur ses tréteaux. Vous auriez entendu dire : « N’est-ce pas là Danton qui passe ?… » Ah ! la coupe était encore pleine.

Tout cela, c’étaient des forces, — discordantes, — mais c’étaient des forces.

Où est-il, celui qui disait : « Irez-vous alors aux catacombes fouiller les ossements ?… Direz-vous au peuple affamé : « Voici les cendres des morts… « Mange, peuple, rassasie-toi… car nous n’avons « rien de plus ! »

Ce temps est venu. La vie, la force, la substance, ce qui nourrissait la Révolution, cela a déjà passé dans la terre.

D’autant plus vivante et terrible se réveille et