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Tout près des fauteuils des juges, du doux et sinistre Herman, la lucarne de Nicolas, imprimeur du tribunal, était toute grande ouverte et montrait flamboyants dans l’ombre les yeux avides et colères du Comité de sûreté ; plusieurs de ses membres étaient là, pour montrer du zèle, montrant qu’ils surveillaient eux-mêmes, sans s’en rapporter aux espions et regardant comment leurs hommes allaient marcher.

Qu’ils marchassent, c’était un problème. Fouquier n’avait ni pièces ni témoins (sauf un contre Fabre). Le Comité ne lui donnait nul moyen, et puis il lui disait : « Marche ! »

Qu’avait donc à présenter ce pauvre Fouquier ? Sa conviction personnelle ? J’en doute. Dans ce mois même, il dîna secrètement avec deux amis de Danton. Pour suppléer par la richesse des mots a la pauvreté des preuves, il fit lire d’abord le long verbiage d’Amar contre les agioteurs, et à la fin l’atroce diatribe de Saint-Just. Entre ces deux grosses pièces, il glissa vite son maigre petit travail, où, tâchant absolument de mettre quelque chose de lui, il n’a trouvé que ce non-sens : « Que Chabot n’était pas plus délicat que Camille Desmoulins. »

Il s’assit. Et alors on s’aperçut qu’on avait oublié de faire venir deux accusés : Lhuillier, qu’on innocenta (parce qu’on s’en servit, il se tua de remords) et Westermann, qui, avec Marceau, venait de finir la Vendée.