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de Paris disparut avec la Commune, où la Montagne plia sous la terreur de la droite, où la tribune, la presse et le théâtre furent rasés d’un même coup.

Le 2 avril, à onze heures, on amena les accusés. La terreur qu’ils inspiraient était marquée naïvement par le soin qu’on avait pris de placer au tribunal (chose nouvelle) deux accusateurs publics. On ne se fiait pas assez à Fouquier-Tinville, parent de Camille Desmoulins et placé par lui. Fouquier, comme un bon nombre des juges et jurés, révolutionnaires subalternes, était client et créature de ceux qu’il allait tuer. Pour l’aider, on le surveilla, on lui donna pour acolyte Fleuriot, un des zéros de Robespierre, qu’il fit bientôt maire de Paris.

La pensée meurtrière du procès parut déjà dans l’arrangement artiste et perfide qu’on vit au banc des accusés. On avait mis Danton et Hérault aux côtés de l’homme le plus sali, Delaunay ; Fabre près de Chabot et Lacroix ; l’irréprochable Phelippeaux à côté de l’agioteur d’Espagnac.

Les deux Allemands Frey, l’Espagnol Gusman, le Danois Deiderikseu, étaient là pour donner bonne mine au procès, pour justifier le mot d’ordre : Conspiration de l’étranger.

Quand Danton entra ainsi entre ces larrons, les cœurs patriotes bondirent. Un greffier du tribunal, Fabricius Paris, jetant tout respect humain, toute peur, traversa la salle, alla au banc des accusés et se jeta en pleurant au cou de Danton.