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se jeta sur Lucile, l’embrassa, et dans son berceau le petit Horace… partit… Famille, amour, amitié, liberté, patrie, toutes les fibres du cœur arrachées du même coup !

Débarqués au Luxembourg, une image d’innocence, bien propre à calmer, vint frapper leurs yeux. Ce grand coupable, Hérault de Séchelles, qui vendait, disait-on, les secrets de la République, sa conscience était si tranquille qu’il était là, dans la cour, qui, comme un enfant, jouait au bouchon. Dès qu’il vit Camille et Danton, il courut à eux et les embrassa.

Danton fut mieux au Luxembourg qu’il n’était depuis longtemps. Sa situation était mauvaise, mais non plus flottante. Il valait mieux pour lui être victime que protégé de Robespierre, comme il fut au 3 novembre. Il se montra gai, causeur, soulagé d’un rôle impossible.

Le concierge du Luxembourg, le bon vieux Renoit, était aimé des prisonniers. Ils racontèrent à Danton ses soins, sa sensibilité, ses larmes pour le malheur. Danton, fort touché, lui dit : « Je vous remercie, Renoît.)>

Il trouva là Thomas Payne, toujours écrivant pour la Révolution, pendant qu’elle l’emprisonnait. « Good day! dit Danton en riant, avec une poignée de main. Ce que tu as fait pour ton pays, j’ai voulu le faire pour le mien. J’ai été moins heureux, mais non plus coupable… On m’envoie à l’échafaud ; eh bien, mes amis, j’irai gaiement ! »