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Ce n’était pas la première fois que Desmoulins hasardait des allusions à la bravoure de Robespierre. Dans le rude coup de cravache dont il cingla Nicolas, son garde du corps, il ne se refusa pas une ligne sur l’amusante figure du porte-bâton qui suivait partout le grand homme. Nicolas fut dès lors connu, regardé, admiré, aussi bien que le chien Brount qui lui fut associé, comme garde du corps, l’été de 1794.

Camille fit encore bien pis. Il trouva, toucha d’une main rude un endroit plus délicat encore en cette âme endolorie. Ce point était celui où l’amour-propre littéraire était mêlé, confondu avec l’orgueil politique. Ceci était le fond du fond. Et même Robespierre eût pu ne pas être un politique ; mais, de toutes façons, s’il n’eût été prêtre, il eût été sans nul doute homme de lettres.

Il faut savoir qu’en janvier, après son grand avantage sur Fabre et sur Phelippeaux, croyant avoir été trop vite et voyant que le procès contre les représentants était loin d’être mûr encore, Robespierre voulut gagner du temps et chercha quelque terrain neutre où l’on pût parler sans rien dire, occuper les Jacobins. Il établit une espèce de concours sur les vices du gouvernement anglais.

La société, redevenue docile depuis le grand coup, donna, sous son pédagogue, le plus étonnant spectacle de radotage académique. Tous, dans leur parfaite ignorance de la question, parlaient d’autant plus aisément. Ce flot d’insipidité coula un mois et plus, sans autre incident que quelques coups de férule