Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/105

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les choses suivirent leur cours, et d’autant plus cruellement que Robin et les autres étaient des enfants eux-mêmes. Nul âge plus cruel pour l’enfance.

Ces sauvages disaient, comme ce pape, des enfants de Frédéric II : « De la vipère vient la vipère. »

Mais là on avait atteint les limites du possible. Ces noyades d’enfants bouleversèrent les cœurs. Les femmes allaient au moment et les arrachaient aux noyeurs. Chaux et d’autres membres du comité révolutionnaire ou de Vincent-la-Montagne, bonnes familles patriotes[1], se firent donner des enfants et les élevèrent. Malheureusement, comme il arrive dans les grandes villes commerçantes, la spéculation s’en mêla. Des femmes en prirent pour trafiquer de ces infortunés et firent des sérails d’enfants. Le comité révolutionnaire ordonna que les filles de plus de quinze ans seraient rendues aux prisons. C’était les rendre à la mort.

Le maire de la ville, Renard, était malade chez lui. Le département avait, dit-on, protesté, mais secrètement. D’honorables citoyens avaient hasardé quelques mots. Le seul qui fut écouté, ce fut Savary, ami de Kléber, l’excellent historien des guerres vendéennes. Savary dit à Carrier qu’en rendant à leurs parents les femmes, les vieillards, les enfants qui venaient de tant souffrir, il répandrait dans la Vendée une extrême terreur de la guerre et l’hor-

  1. Citons entre autres les Mangin, de patriotisme, de talent héréditaires, famille dès ce temps chère à l’art, à la liberté.