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Les patriotes ne s’étonnèrent pas. Ils étaient trois cents armés de fusils et cinq cents armés de piques, plus cent dragons de nouvelle levée[1]. M. de Bauvau, procureur-syndic, un noble très républicain, était à leur tête. La pluie tombait. La vue des trente prisonniers qu’il fallait fusiller d’abord pour arriver à l’ennemi, refroidissait les patriotes. Dans ce moment d’hésitation, les tirailleurs vendéens commencent. On sut plus tard quels étaient ces tireurs terribles, légers autant qu’intrépides, qui, s’éparpillant aux ailes, au front des colonnes, étonnaient les républicains par la précision meurtrière des premiers coups. Ce n’étaient nullement, le bon sens suffirait pour l’indiquer, de lourds paysans ; c’étaient généralement des contrebandiers, de véritables brigands, dignes du nom que l’on étendit à tort à tous les Vendéens. L’élite des paysans, moins leste, mais très brave et très ferme, formait un noyau derrière ces coureurs, mais ne couraient pas eux-mêmes, et pour une raison bien simple : la plupart étaient en sabots.

Aux premiers coups, M. de Bauvau tombe, plusieurs grenadiers avec lui. La cavalerie qui chargeait s’effraye, revient, renverse tout. Les patriotes en retraite se jetèrent dans un pavillon du château et tirèrent de là

  1. J’admire la puissance des historiens royalistes. Ils trouvent des garnisons pour les villes qui n’en avaient pas ; ils créent des armées entières pour les faire battre par les Vendéens. Nous avons des détails plus précis dans les historiens militaires. Voir un ouvrage très riche en pièces originales, Guerre des Vendéens, par un officier supérieur, 1824, 6 vol. in-8o, et Dix années de guerre intestine, par le colonel Patu-Deshautschamps (1840), ouvrage publié avec approbation du ministre de la guerre.