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charge terrible d’improviser une armée, personnel et matériel, tout compris, les hommes et les choses. Elle leur donnait droit de requérir non les recrues seulement, mais l’habillement, l’équipement, les transports. Rien n’était plus propre à effaroucher les Vendéens. On disait que la République allait requérir les bestiaux… Toucher à leurs bœufs ! grand Dieu !… C’était pour prendre les armes.

La loi de la réquisition autorisait les communes à s’arranger en famille pour former le contingent. S’il y avait un garçon trop nécessaire à ses parents, la municipalité le laissait et elle en prenait un autre. C’est justement cet arbitraire qui multipliait les disputes. Par cette loi imprudente, la Convention se trouva avoir appelé tout un peuple à discuter. Les municipaux ne savaient à qui entendre. Républicains ou royalistes, ils étaient presque également injuriés, menacés. Un municipal royaliste que les paysans voulaient assommer leur disait : « Y songez-vous ?… mais jamais » vous n’en trouverez qui soit plus aristocrate. »

Ces haines atroces éclatèrent le 10, à Machecoul. Au bruit du tocsin qui sonnait, une énorme masse rurale fond sur la petite ville. Les patriotes sortirent intrépidement, deux cents hommes contre plusieurs mille. La masse leur passa sur le corps. Elle entra d’un flot, remplit tout. C’était dimanche ; on venait se venger et s’amuser. Pour amusement, on crucifia de cent façons le curé constitutionnel. On le tua à petits coups, ne le frappant qu’au visage. Cela fait, on