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qu’on voulait effrayer et non égorger, soit que son dédain de la vie lui ait fait braver cette chance, il vint sur ces bancs déserts où semblait planer la mort. Il endura patiemment, article par article, la lecture, le vote du terrible projet de Lindet[1]. Il ne dit qu’un mot : « Je demande l’appel nominal ; il faut connaître ceux qui nomment sans cesse la Liberté pour l’anéantir. » L’appel nominal était demandé aussi par un honnête homme, La Révellière-Lepeaux.

Le simple mot de Vergniaud suffisait comme déclaration de la loi mourante.

Un Montagnard voulait qu’il n’y eût pas de jurés. « Non, dit Thuriot, l’ami de Danton, il faut des jurés, mais qu’ils opinent à haute voix. » La Convention adopta. La Terreur était dans ce mot, plus que dans tout le projet.

La Convention, ce soir-là, n’ayant ni argent, ni force, ni armée organisée, pour suffire à tout, créa un fantôme.

Évoquée de toute l’Europe contre la France par les royalistes, la Terreur leur fut renvoyée comme un songe sanglant.

L’armée reculait démoralisée, elle rentrait… Elle vit la Terreur à la frontière.

  1. Terrible, mais non absurde, comme il avait été dans la rédaction présentée le matin. Le tribunal ne devait poursuivre que les actes, les attentats, les complots. Les municipalités surveillaient, dénonçaient. Mais les dénonciations n’arrivaient au tribunal qu’après avoir été examinées par un comité de la Convention, qui lui en faisait rapport, dressait les actes d’accusation, surveillait l’instruction, correspondait avec ce tribunal et rendait compte à l’Assemblée.