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Une tombe fermée veut le silence, mais celle-ci n’est pas fermée, elle est béante et demande…

La chaux de la Madeleine est dévorante, elle est altérée, elle veut de la pâture. Ce n’est rien que Louis XVI. Il lui faut des hommes tous autres, nos grands citoyens, les héros de la patrie.

Donc, puisque la tombe est ouverte, nous dirons un mot encore : nous jugerons le jugement.

Ce procès, nous l’avons dit, avait eu l’effet très fatal de montrer le roi au peuple, de le replonger dans le peuple, de les remettre en rapport. Louis XVI, à Versailles, entouré de courtisans, de gardes, derrière un rideau de Suisses, était inconnu au peuple. Au Temple le voilà justement comme un vrai roi devrait être, en communication avec tous, mangeant, lisant, dormant sous les yeux de tous ; commensal, pour ainsi dire, et camarade du marchand, de l’ouvrier. Le voilà, ce roi coupable, qui apparaît à la foule en ce qu’il a d’innocent, de touchant, de respectable. C’est un homme, un père de famille ; tout est oublié. La nature et la pitié ont désarmé la justice.

Ce n’est rien de le montrer, on le change, on le refait. Le procès en fait un homme. À Versailles, c’est un être fort prosaïque, vulgaire, point méchant, point bon, mais sensible et facile de cœur, asservi à ses habitudes, tout entier dans la famille, étroitement dévot, avec un vice de dévot une certaine sensualité dans les choses de la table. Une prison humaine n’y eût rien changé. Mais cette captivité