Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/164

Cette page a été validée par deux contributeurs.

étaient pas moins dirigés (comme toujours) par l’homme de plume. J’appelle ainsi trois personnages, déjà très influents dans la Commune du 10 août : Lhuillier d’abord, l’homme de Robespierre, ex-cordonnier, quelque peu clerc, qui prenait alors le titre d’homme de loi ; puis, au delà de Robespierre, les aventureux journalistes Hébert et Chaumette. Ils se firent nommer procureur et procureur-syndic de la Commune. Le maire seul fut Girondin ; ce fut le médecin Chambon ; on a pu voir par septembre, par la mairie de Pétion, que cette charge était un honneur plutôt qu’une autorité.

Le 2 décembre, la veille du discours de Robespierre, la nouvelle Commune, à peine nommée, vint, comme un flot furieux, frapper à la Convention. Fureur vraie ou simulée ? Si l’emphase ridicule rendait la parole suspecte, on croirait volontiers que l’adresse, froide et violente, enflée jusqu’au dernier burlesque, sortit d’une plume hypocrite (peut-être celle d’Hébert). Le nouveau roi, le peuple, comme les rois du Moyen-âge, avait près de lui tel bouffon, pervers et cynique, qui se moquait de son maître. Le rédacteur, s’inspirant des plus mauvais vers de Corneille, se dressant sur des échasses pour commander à l’Assemblée de toute la hauteur du peuple, jetait toutefois, parmi les banalités, des mots significatifs : Le peuple peut s’ennuyer… Et encore : « La mort pourrait vous soustraire votre victime… et alors on publierait que les Français n’ont pas osé juger leur roi… »