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l’Assemblée par l’organe de Robespierre. Aussi, quand Louvet rappela ces scènes funèbres, et que la Convention, plusieurs même des Girondins, l’appuyaient assez mollement, Cambon ne se contenant plus et s’élançant de son banc jusqu’au milieu de la salle, poussa ce cri à Robespierre, montrant sa main prête à frapper : « Misérable ! voilà l’arrêt du dictateur. »

Inflexible pour la Commune, à tout ce qu’elle disait Cambon répondait : « Vos comptes ! rendez vos comptes d’abord. » À travers toutes les crises, rien ne put le faire reculer d’un pas là-dessus, jusqu’à l’enquête de mars, qui tira de la bouche de Sergent et de quelques autres de si tristes aveux[1].

Il y eut ainsi contre Cambon un accord singulier, extraordinaire.

La Commune voulait perdre, en lui, son accusateur obstiné.

Les Jacobins voulaient le perdre. Ils ne lui pardonnaient pas son absence, son éloignement de la société, le mépris qu’il semblait en faire.

Les prêtres voulaient le perdre. Il vendait leurs

  1. Les dépositions, fort curieuses, témoignent que Maillard avait pris d’extrêmes précautions pour que les effets et bijoux des morts de l’Abbaye fussent en sûreté. Ces effets, enlevés, malgré Maillard, par le comité de surveillance, sans inventaire, sans précautions, furent (Sergent l’avoue) convoités par les membres du comité ; Sergent, Panis, Deforgues et autres se choisirent chacun une montre (outre la fameuse agate). Sergent emporte les montres pour les faire estimer par son horloger, il se charge d’en faire acheter, il en achète pour un autre, il donne un acompte, etc. Triste maquignonnage, dans cette magistrature terrible et alors toute-puissante ! (Archives de la Seine, Conseil général de la Commune, Comptabilité, vol. XXXIX, c. xiii.