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lement forte en ce moment de violence, était faible en ceci, qu’elle était double et qu’elle avait deux chefs, entre lesquels elle se partageait. Pour la rendre forte, il fallait annuler l’un des deux. C’est le service que les Roland rendirent à leurs ennemis.

Danton une fois immobilisé, réduit à la défensive, ne portant plus le drapeau, mais s’abritant dessous, Robespierre le portait. Le chef moral des Jacobins devenait le chef politique de la Montagne aussi bien que de la Commune, et la Révolution dès lors allait, froide et terrible, derrière un raisonneur qui n’en représentait nullement les instincts magnanimes.

Robespierre, à vrai dire, avait avancé à force de ne rien faire. Ses adversaires ou ses rivaux, s’immolant les uns les autres, travaillaient pour lui et l’exhaussaient toujours. Pour lui, en 1791, les Lameth tuèrent Mirabeau. Pour lui, en 1792, les Girondins, aidés du centre, commencèrent à briser Danton.

Les Girondins pourtant n’étaient pas unanimes sur la tactique à suivre contre Danton et Robespierre. Leur homme de génie, Vergniaud, voulait qu’on respectât le génie de la Montagne, qu’on ménageât Danton. Brissot, tout ardent qu’il pût être à frapper moralement Robespierre, n’était nullement d’avis qu’on l’attaquât juridiquement, qu’on lui fît un procès en règle, dans lequel on échouerait. Rabaut-Saint-Étienne, l’illustre pasteur protestant (le fils du martyr des Cévennes), initié à la vie politique par la longue tradition des partis religieux, voyait aussi