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tionnaire. Cette Assemblée, nous l’avons nommée de son vrai nom, ce concile, abrégeait, tranchait les affaires la nuit dans ses comités, et elle consacrait ses jours, son attention, ses efforts, à discuter insatiablement le symbole de la loi nouvelle. Tout le plus fort de son combat s’est passé dans la pensée pure, dans la région des esprits.

C’est le spectacle étrange, mais vraiment noble, qu’elle a offert au monde. Sur toute chose d’intérêt réel, actuel, elle est aisément d’accord. Fille de la philosophie du dix-huitième siècle, elle n’attachait vraiment d’importance qu’aux idées, elle en vivait, elle en mourait. Les membres qu’elle retrancha si cruellement de son sein ne conspiraient pas, ne menaçaient en rien le salut de la Révolution. Ils moururent, comme hérétiques.

La France entrait, d’une si grande passion, dans sa vie d’unité que les moindres diversités y tranchaient plus fortement et faisaient horreur. Des nuances souvent légères semblaient des anomalies monstrueuses et dignes de mort. Au contraire, les autres nations, dans l’état vraiment discordant où chacune d’elles restait, n’ayant encore nulle harmonie d’éléments ni de principes, n’avaient garde de s’apercevoir de leurs plus fortes dissonances. Barbares et ne sachant pas même combien elles étaient barbares, elles acceptaient bien mieux la diversité misérable d’éléments non conciliés qu’elles portaient dans leur sein. Elles triomphaient de leur chaos indigeste qui n’en était pas même à désirer l’unité.