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iræ, hurlé avec fureur, est-ce rien autre chose qu’une prière de meurtre, un appel aux feux éternels ?

« Laissez faire, disait-on, ils chantent, n’agissent pas. » Cependant, on voyait déjà s’ébranler de grandes foules. En Alsace, huit mille paysans s’assemblèrent pour empêcher de mettre les scellés sur un bien ecclésiastique. Ces bonnes gens, à la vérité, disait-on, n’avaient d’armes que leur chapelet. Mais le soir ils en avaient d’autres, quand le curé constitutionnel, rentré chez lui, recevait des pierres dans ses vitres, et que parfois la balle perçait ses contrevents.

Ce n’était pas par de petits ressorts d’intrigues timidement ménagés, indirects, qu’on poussait les masses à la guerre civile. On employait hardiment les plus grossiers moyens pour leur brouiller l’esprit, les enivrer de fanatisme ; on leur versait l’erreur et le meurtre à pleins bords. La bonne vierge Marie apparaissait et voulait qu’on tuât. À Apt, en 1792, comme en 1790 à Avignon, elle se remua, fit des miracles, déclara qu’elle ne voulait plus rester dans les mains des constitutionnels, et les réfractaires l’enlevèrent, au prix d’un violent combat. Mais il y a trop de soleil en Provence ; la Vierge aimait bien mieux apparaître en Vendée, dans les brumes, les épais fourrés, les haies impénétrables. Elle profita des vieilles superstitions locales, elle se montra dans trois lieux différents, et toujours près d’un vieux chêne druidique. Son lieu chéri était ce Saint-Laurent