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Visiblement le parti qui écartait la question par l’ordre du jour était en minorité.

Vergniaud obtint de parler, posa très bien la question. Il ne s’agissait pas de conseils adressés à l’Assemblée, sous forme de pétition, par un simple citoyen, mais par un général d’armée à la tête de ses troupes. Les conseils d’un général, qu’est-ce, si ce ne sont des lois qu’il impose ?

Cette judicieuse parole ne produisait pas d’effet.

Admirez l’esprit des assemblées. Ce fut par une surprise, un prétexte pris au hasard, une assertion évidemment non fondée, que Guadet rendit les esprits flottants et commença à relancer l’opinion de l’autre côté : « La lettre est-elle vraiment de M. de La Fayette ? Non, cela est impossible. Si c’est bien sa signature, c’est qu’il l’a envoyée en blanc et qu’on l’a remplie ici. Il parle, le 16 juin, de la démission de M. Dumouriez, qui n’avait pas eu lieu et qu’il ne pouvait connaître. »

Cela arrêta l’Assemblée. Or il n’y a pas un mot dans la lettre de La Fayette qui indique qu’il connaît la démission de Dumouriez.

Alors Guadet, rompant les chiens, détournant l’attention, jette un mot provocant qui engage le débat, ajourne le vote, fait gagner du temps : Lorsque Cromwell osait parler ainsi… » (Grands cris : « Monsieur, c’est abominable ! ») etc.

Le tumulte va croissant. La première impression se dissipe ; l’Assemblée, sans s’en apercevoir, redevient ce qu’elle était. Elle vote, sous l’influence de